L’Institut Pasteur et INRAE renforcent leur partenariat pour faire face aux risques infectieux et toxiques et pour prévenir les maladies zoonotiques. Christophe d’Enfert, directeur général adjoint scientifique de l’Institut Pasteur nous explique l’importance de cette collaboration dans le domaine de la biologie du vivant, et au bénéfice de la santé animale et humaine.
Une nouvelle convention cadre de collaboration engage jusqu’en 2026 l’Institut Pasteur et INRAE. Né le 1er janvier 2020, INRAE est l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Il est issu de la fusion entre l’Inra, Institut national de la recherche agronomique, et Irstea, Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture. C’est le premier organisme de recherche spécialisé sur ces trois domaines scientifiques : l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. L’Institut Pasteur est, quant à lui, un centre de recherche biomédicale qui se consacre à l’étude de la biologie du vivant. C’est un leader mondial reconnu notamment dans le domaine des maladies infectieuses, de la microbiologie et de l’immunologie.
Christophe d’Enfert, directeur général adjoint scientifique de l’Institut Pasteur
Que représente ce partenariat avec INRAE pour l’Institut Pasteur ?
Christophe d’Enfert : Tout a commencé avec l’Institut national de la recherche agronomique (Inra). A la fin des années 90, la collaboration de l’Institut Pasteur avec cet institut a été renforcée du fait de l’intérêt de l’Inra pour la microbiologie du tube digestif. L’Inra s’engageait alors fortement dans le domaine de la microbiologie du tube digestif, avec en particulier le développement de son expertise en métagénomique, et souhaitait travailler avec des experts des bactéries et des champignons du tube digestif. C’est comme ça que deux unités de l’Institut Pasteur ont, il y a 20 ans, été soutenues par l’Inra : une qui travaillait sur les Listeria (bactéries responsables de la listériose) et une autre sur Candida albicans (levure responsable des candidoses).
L’unité Biologie et pathogénicité fongique, qui travaille toujours sur Candida albicans, est aujourd’hui un laboratoire d’INRAE hébergé à l’Institut Pasteur (lire la publication récente de cette unité : Thérapie antifongique : la protéine Csa6, cible potentielle pour le développement d’un traitement).
De plus, les équipes d’INRAE et de l’Institut Pasteur se retrouvent au sein d’un programme européen coordonné par l’Anses* sur le concept One Health. Fort de toutes ces premières collaborations fructueuses, nous souhaitons renforcer nos liens sur des thématiques nouvelles.
* Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail
Une nouvelle équipe de l’Institut Pasteur va-t-elle être soutenue par INRAE ?
C.d’E. : Oui, il s’agit de l’équipe d’Anavaj Sakuntabhai qui travaille sur le thème Écologie et émergence des pathogènes transmis par les arthropodes. Sarah Bonnet, directrice de recherche INRAE, est arrivée il y a quelques mois dans l’équipe avec une expertise reconnue dans les maladies transmises par les tiques. L’étude des borrélioses est un domaine dans lequel l’Institut Pasteur a longtemps été expert et il était naturel de renouveler et renforcer nos équipes sur ce thème. Les tiques sont des insectes présents dans notre environnement qui véhiculent des maladies. Tous les microorganismes portés par les tiques ne sont pas dangereux pour l’être humain mais certains le sont (cf. fiche Maladie de lyme - Borréliose de lyme). Nous sommes donc très heureux que Sarah Bonnet ait rejoint l’Institut Pasteur pour poursuivre ses études sur les tiques et apporter ses compétences de parasitologue et entomologiste médicale et vétérinaire.
Cette collaboration avec INRAE illustre le lien entre biologie et santé.
C.d’E. : En effet, la collaboration entre l’Institut Pasteur et INRAE portent ainsi sur des domaines d’intérêt commun, comme l’étude des liens entre le microbiote, la nutrition et les maladies non transmissibles, ou encore la sécurité biologique des aliments.
En quoi les partenariats, au sens large, sont-ils importants pour l’Institut Pasteur ?
C.d’E. : Ils ont toujours été importants et le seront de plus en plus dans un univers concurrentiel où le partage des compétences est une force. Cela rentre dans le cadre de notre Plan stratégique 2019-2023, dans lequel nous souhaitons consolider les partenariats nationaux pour dynamiser l’excellence scientifique de l’Institut Pasteur.
- Lire l’interview du directeur général adjoint scientifique de l’Institut Pasteur au sujet des partenariats notamment, dans le rapport annuel 2021
- Découvrir deux publications récentes de l’Institut Pasteur sur les tiques :
- Les tiques vivent sur le dos de petits mammifères que l’Institut Pasteur a étudiés il y a quelques années dans certaines forêts d’Île-de-France pour comprendre le risque de transmission de maladies à l’être humain.
- L’Institut Pasteur a aussi étudié la rapidité de la transmission par les tiques infectées, rappelant la nécessité d’enlever les tiques le plus tôt possible après la piqûre afin de prévenir l’infection.
Et aussi le projet French Gut… Un projet de recherche appelé French Gut, porté par INRAE en collaboration avec l’AP-HP – un autre des partenaires historiques de l’Institut Pasteur – a été lancé mi-septembre 2022. Il a vocation à cartographier le microbiote des Français et étudier ses interactions avec notre santé. L’Institut Pasteur est l’un des nombreux partenaires associés à ce vaste projet. Les connaissances sur le microbiote ont énormément progressé ces vingt dernières années et l’Institut Pasteur a pris sa part dans ces avancées. Nous avons de nombreuses équipes sur le sujet. « A titre d’exemple, nous cherchons les facteurs prédictifs de la variabilité du microbiote et comment ils influent sur les maladies inflammatoires de l’intestin, nous étudions aussi le microbiote des moustiques qui transmettent des maladies aux êtres humains, nous avons aussi un grand programme de recherche sur le lien entre le microbiote et le cerveau. Ce ne sont que quelques exemples de notre expertise dans le domaine et nous espérons pouvoir apporter notre pierre au French Gut d’INRAE. », explique Christophe D’Enfert. |
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