Identification d'un nouveau gène associé à l'autisme

Communiqué de presse
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Une équipe de l'Institut Pasteur vient d'identifier un nouveau gène impliqué dans l'autisme. Le rôle clé de ce gène dans l'organisation des connections neuronales apporte de nouvelles informations sur ce trouble du développement, atteignant les jeunes enfants, et dont l'origine demeure encore mystérieuse. Ces travaux sont publiés en avant-première sur le site de la revue Nature Genetics.

 

 

Communiqué de presse
Paris, le 18 décembre 2006

 

 

L’autisme est un syndrome complexe, classé parmi les troubles envahissants du développement, qui apparaît avant l’âge de 3 ans. Il est caractérisé par des déficits dans les interactions sociales et la communication, associés à un répertoire de comportements restreints, répétitifs et stéréotypés. Aujourd’hui, un enfant sur 200 serait atteint d’autisme, avec une fréquence quatre fois plus élevée chez les garçons.

Depuis plusieurs années, de nombreuses recherches ont été menées pour identifier les gènes de susceptibilité à l’autisme. En 2003, une étude menée par le groupe de Thomas Bourgeron, responsable du groupe Génétique humaine et fonctions cognitives à l’Institut Pasteur avait permis d’identifier, chez des personnes atteintes d’autisme ou du syndrome d’Asperger (forme moins sévère de l’autisme), des mutations altérant deux gènes situés sur le chromosome X (neuroligines NLGN3 et NLGN4) (voir communiqué de presse du 31 mars 2003). Les neuroligines sont des protéines impliquées dans la formation des synapses (zones de communication entre les neurones).

Cette équipe de l’Institut Pasteur s’est depuis intéressée à une région particulière du chromosome 22, appelée 22q13. En effet, des altérations de cette région étaient responsables de retard mental, d’autisme et de trouble du langage, mais le gène en cause n’avait pas été identifié jusqu’à ce jour.
Le groupe de Thomas Bourgeron à l’Institut Pasteur, en collaboration avec l’Inserm, les services de psychiatrie parisiens du Pr. Marion Leboyer (CHU de Créteil) et du Pr. Marie-Christine Mouren-Siméoni (hôpital Robert Debré de l’AP-HP) et en Suède du Pr. Christopher Gillberg (département de psychiatrie de l’université de Göteborg) a identifié dans cette région 22q13 un gène, appelé SHANK3. Ce gène code une protéine connue pour interagir avec les neuroligines et qui joue un rôle crucial pour le développement des synapses.

Les chercheurs ont observé que cinq enfants autistes présentaient des altérations de SHANK3 à des degrés divers, allant de simples mutations à des délétions importantes du gène. Pour deux de ces enfants, les seules altérations mises en évidence dans la région 22q13 étaient des mutations dans SHANK3, faisant de ce gène le responsable des troubles observés. Pour un autre enfant ayant une forme d’autisme moins sévère, une duplication du gène a été observée, suggérant qu’outre son altération, une surexpression de SHANK3 pourrait aussi être impliquée dans ces troubles de la communication.
L’ensemble de ces résultats montre que SHANK3 est le gène qui est à l’origine des troubles observés.

Les scientifiques émettent l’hypothèse que l’altération de SHANK3, comme celle des neuroligines, pourrait affecter certaines synapses essentielles aux processus de communication entre les neurones. Ces gènes codent en effet des protéines d’échafaudage ou d’adhésion cellulaire localisées au niveau des synapses, ce qui suggère qu’un défaut dans la formation des synapses augmenterait la susceptibilité à l’autisme.

L’incidence génétique des troubles de l’autisme est de plus en plus documentée. Ainsi, on sait que le risque d’avoir un deuxième enfant atteint dans les familles ayant déjà un enfant autiste est 45 fois plus élevé que dans la population générale. Aussi, si SHANK3 et les neuroligines semblent impliqués dans une forme d’autisme touchant la jonction synaptique, ils ne répondent encore qu’à un nombre limité des cas observés. D’ailleurs, l’analyse faite chez 155 autres individus présentant des troubles comportementaux n’a montré aucune altération apparente de SHANK3. Des études génétiques supplémentaires sont en cours pour identifier d’autres gènes en cause dans ces troubles graves du langage et de la communication.

Cette étude a été menée avec le soutien de l’Institut Pasteur, l’Inserm, la Délégation à la Recherche Clinique de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, la Fondation France Télécom pour la recherche sur l’autisme, la Fondation de France, la Fondation pour la Recherche médicale, le 6ème cadre de la recherche européene, la Fondation biomédicale de la Mairie de Paris, la Fondation NRJ, Cure Autism Now et Swedish Science Council.

Sources

« Mutations in the gene encoding synaptic scaffolding protein SHANK3 are associated with autism spectrum disorders» Nature Genetics, décembre 2006
Christelle M Durand (1), Catalina Betancur (2), Tobias M Boeckers (3),Juergen Bockmann (3), Pauline Chaste (1), Fabien Fauchereau (1,4), Gudrun Nygren (5), Maria Rastam (5), I Carina Gillberg (3), Henrik Anckarsäter (5), Eili Sponheim (6), Hany Goubran-Botros (1), Richard Delorme(1), Nadia Chabane (7),Marie-Christine Mouren-Simeoni (7), Philippe de Mas (8), Eric Bieth (8), Bernadette Rogé (9), Delphine Héron (10), Lydie Burglen (11), Christopher Gillberg (5,12), Marion Leboyer (2,13) et Thomas Bourgeron (1,4)

1. Groupe Génétique humaine et fonctions cognitives, Institut Pasteur, Paris
2. Université Paris XII, Inserm U513, Créteil
3. Institute of Anatomy and Cell Biology, Université d’Ulm, Allemagne
4. Université Denis Diderot Paris 7, Paris
5. Department of Child and Adolescent Psychiatry, Université Göteborg, Suède
6. Centre for Child ans Adolescent Psychiatry, Université d’Oslo, Norvège
7. Service de Psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent, Hôpittal Robert Debré, Paris
8. Département de Génétique médicale, Hôpital Purpan, Toulouse
9. Centre d’études et de recherches en Psychopathologie, Université de Toulouse le Mirail, Toulouse
10. Département de Génétique, Groupe Hospitalier Piltié-Salpêtrière, Paris
11. Service de Génétique, Hôpital Trousseau, Paris
12. Saint George’s Hospital Medical School, London
13. Département de Psychiatrie, Groupe Hospitalier Henri Mondor et Albert Chenevier, Paris

Contact presse

Nadine Peyrolo ou Bruno Baron- Tél : 01 44 38 91 30- bbaron@pasteur.fr

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