L'art du camouflage du parasite responsable du paludisme

Communiqué de presse
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Des chercheurs de l'Institut Pasteur et du CNRS ont mis au jour les mécanismes originaux qui permettent au parasite responsable du paludisme de tromper le système immunitaire des personnes qu'il infecte. En collaboration avec des chercheurs du Walter and Eliza Hall Institute of Medical Research de Melbourne, ils ont montré, dans deux articles publiés dans Cell, que le parasite est capable de modifier avec une très grande efficacité la composition de sa « signature » immunologique. Cette capacité à déguiser sa présence empêche l'organisme des personnes infectées de produire des défenses permettant d'éliminer les cellules infectées. La compréhension de ces mécanismes devrait permettre de développer plus efficacement des outils de lutte contre ce fléau qui tue un enfant toutes les 30 secondes en Afrique et entre 1 et 3 millions de personnes par an dans le monde.

 

 

Communiqué de presse
Paris, le 14 avril 2005

 

 

Afin de tromper les défenses immunitaires des personnes infectées, le parasite Plasmodium falciparum, responsable du paludisme, a développé un étonnant pouvoir de camouflage. Lorsqu’un parasite infecte un globule rouge, sa présence peut être détectée par l’existence d’une protéine parasitaire à la surface de la cellule : le système immunitaire peut alors apprendre à reconnaître cette protéine et développer des armes pour éliminer les globules rouges infectés.

Pour contrer ces défenses, les parasites ont développé un étonnant pouvoir de déguisement en se montrant capables de modifier très rapidement la signature immunologique de cette protéine, rendant les réponses immunitaires inefficaces. Les mécanismes conduisant à cette variabilité immunitaire, qui rend la lutte contre le paludisme si difficile, demeuraient jusqu’alors inconnus.

Les chercheurs de l’Unité de Biologie des Interactions Hôte-Parasite, CNRS-Institut Pasteur, dirigée par Arthur Scherf, ont décrypté le mécanisme original utilisé par le parasite pour se cacher dans l’organisme. La protéine présentée à la surface des globules rouges est produite par une famille composée d’une soixantaine de gènes appelés var. Les chercheurs ont montré comment les parasites ont développé une méthode efficace et originale pour sélectionner à volonté l’expression de l’un ou l’autre de ces gènes, en modifiant subtilement la structure même des autres gènes pour les rendre inactifs. Ce phénomène étant réversible, le parasite est capable, lorsque les défenses immunitaires commencent à réagir, de modifier de nouveau le choix du gène exprimé et de rendre cette réponse inefficace.

L’originalité du phénomène décrypté vient du fait qu’il s’agit de modifications épigénétiques, c’est à dire des changements transitoires de la structure complexe qui supporte l’ADN, la chromatine. Ces événements aboutissent à neutraliser les régulateurs génétiques naturels pour influer sur le phénotype sans altérer le matériel génétique du parasite. Les chercheurs ont observé que l’ADN prend une structure particulière qui se propage depuis l’extrémité des chromosomes jusqu’à l ‘emplacement proche où les gènes var sont regroupés. C’est la première fois que de telles régulations épigénétiques sont mises en évidence pour la régulation des gènes de ce parasite.

Cette découverte majeure ouvre la voie au développement de nouvelles stratégies visant à contrer les mécanismes de protection de Plasmodium falciparum et à l’empêcher d’échapper au système immunitaire. C’est une étape essentielle pour la lutte contre le paludisme.

Sources

"Telomeric Heterochromatin Propagation and Histone Acetylation Control Mutually Exclusive Expression of Antigenic Variation Genes in Malaria Parasites" Cell, 8 avril 2005.
Lucio H. Freitas-Junior (1), Rosaura Hernandez-Rivas (3), Stuart A. Ralph (1), Dvorak Montiel-Condado (3), Omar K. Ruvalcaba-Salazar (3), Ana Paola Rojas-Meza (3), Liliana Mâncio-Silva (1), Ricardo J. Leal-Silvestre (1), Alisson Marques Gontijo (1), Spencer Shorte (2) and Artur Scherf (1)

1. Unité des Interactions Hôte-Parasite, Institut Pasteur
2. Plate forme d’Imagerie Dynamique
3. Département de Biomédecine Moléculaire, centre de recherche et d’études avancées de l’IPN, Mexico

"Heterochromatin Silencing and Locus Repositioning Linked to Regulation of Virulence Genes in Plasmodium falciparum" Cell, 8 avril 2005.
Manoj T. Duraisingh (1), Till S. Voss (1), Allison J. Marty (1, 2), Michael F. Duffy (3), Robert T. Good (1), Jennifer K. Thompson (1), Lucio H. Freitas-Junior (4), Artur Scherf (4), Brendan S. Crabb (1) et Alan F. Cowman (1)

1. The Walter and Eliza Hall Institute of Medical Research, Melbourne, Australie
2. Departement de Microbiology, Monash University, Clayton, Australie
3. Department of Medicine, University of Melbourne, Melbourne, Australie
4. Unité des Interactions Hôte-Parasite, Institut Pasteur

Contact presse

Service de presse de l’Institut Pasteur
Bruno Baron
01 44 38 91 30 -  bbaron@pasteur.fr
Nadine Peyrolo
01 45 68 81 47 -  npeyrolo@pasteur.fr

Service de presse du CNRS
Muriel Ilous
01 44 96 43 09 - muriel.ilous@cnrs-dir.fr
 

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