Une étude menée au Cameroun a porté sur les virus intestinaux chez les êtres humains et certains grands singes. Ces virus partagent les mêmes génomes. Ce « partage » serait dû à la chasse, à la consommation de viande et au pillage par les grands singes. Ces résultats confirment l’importance des transmissions de pathogènes entre humains et animaux, qui menacent parfois la santé humaine et la santé animale.
Une étude récente montre une convergence des génomes des virus eucaryotes gastro-intestinaux entre les humains et les grands singes d’une forêt du Cameroun. Ces travaux sur les « viromes » ont été menés en collaboration avec l’Institut Pasteur, le CNRS, le Centre Pasteur du Cameroun et l’hôpital Saint-Louis. L’observation sur le terrain, au Cameroun, a été comparée à un zoo européen où les chercheurs, Victor Narat au CNRS et Tamara Giles-Vernick à l’Institut Pasteur, ainsi que son équipe, démontrent un partage viral moins prononcé.
Pourquoi les génomes des virus intestinaux sont si proches chez l’humain et les grands singes ?
La convergence des viromes observée dans la forêt camerounaise serait dû à un partage des terres cultivables avec les grands singes, la chasse et le pillage des cultures par ces animaux ; contrairement à un zoo où le contact physique et environnemental avec les gardiens est présent mais des mesures sanitaires sont appliquées (lavage de main…).
De plus, cette étude compare le partage de virome entérique humains-chimpanzés et révèle un contact moins fréquent et un partage viral moindre. Le contact physique et environnemental expliquerait cette convergence du virome intestinal entre l’être humain et le gorille de la forêt du Cameroun.
Influences de l'histoire, des perceptions et des pratiques humaines ainsi que de l'écologie et du comportement des grands singes sur le partage des viromes intestinaux eucaryotes © M.Vernick / AdobeStock
L’anthropologie contribue à comprendre l’émergence des maladies
Les transmissions de pathogènes entre humains et animaux menacent à la fois la santé humaine et la santé animale. Cette étude intègre des analyses métagénomiques, historiques, anthropologiques et écologiques et compare un site en milieu naturel au Cameroun et un zoo européen.
« Grâce à une approche intégrée de One Health, nous avons identifié les champs comme une plateforme de partage viral entre les hommes et les grands singes dans la forêt d'Afrique centrale. Cette étude montre à quel point il est crucial pour les chercheurs qui étudient la transmission de zoonose de l’animal vers l’humain et de l’humain vers l’animal, de rassembler des approches disciplinaires multiples, y compris les sciences sociales, afin de comprendre ces événements complexes. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons anticiper ces événements et prévenir les épidémies qui en résultent. », explique Tamara Giles-Vernick, responsable de l’unité Anthropologie et Ecologie de l'Emergence des Maladies à l’Institut Pasteur.
Victor Narat a effectué ces recherches lors de son post-doctorat dans le groupe Anthropologie médicale et environnement dirigé à l’époque par Tamara Giles-Vernick, au sein de l’unité Epidémiologie des maladies émergentes d’Arnaud Fontanet.
The article will be included in the Nature Communications One Health collection.
En savoir plus sur le site du CNRS : Explorer la diversité des virus intestinaux des humains et des grands singes | INEE (cnrs.fr)
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Maladies infectieuses émergentes du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.
Source :
Higher convergence of human-great ape enteric eukaryotic viromes in central African forest than in a European zoo: a One Health analysis, Nature communications, 21 juin 2023.
DOI : 10.1038/s41467-023-39455-9