La variole du singe est une maladie infectieuse émergente et négligée, causée par le virus monkeypox (MPXV). Cette maladie a une présentation clinique similaire à celle de la variole avec une éruption maculopapulaire (éruptions cutanées sous forme de petites tâches), atteignant la paume des mains et la plante des pieds.
La transmission du virus MPXV, responsable de la variole du singe, chez l’humain se fait soit par contact direct avec des animaux infectés, soit par contact avec les fluides biologiques ou gouttelettes respiratoires d'une personne infectée. Bien que la variole du singe soit une zoonose, le réservoir animal n’a pas encore été formellement identifié. Des cas humains de MPXV sont retrouvés dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Dans le bassin du Congo, deux pays sont particulièrement touchés, la République démocratique du Congo (RDC) et la République centrafricaine (RCA) pour lesquels une augmentation du nombre de cas au cours de ces deux dernières décennies est observée. (voir Variole du singe : le potentiel épidémique augmente tant que l’immunité collective diminue contre les virus du genre orthopoxvirus - responsable de la variole humaine)
Séquençage du génome des souches de MPXV des dernières épidémies en RCA
Même si de nombreux génomes de MPXV ont été séquencés notamment en RDC et au Nigéria, aucune donnée génomique n’était actuellement disponible pour la RCA. Dans le cadre d’une collaboration internationale entre plusieurs équipes, les génomes de 10 isolats de MPXV, collectés lors d’épidémies entre 2001 et 2018 en RCA, ont été séquencés. Ces données ont permis de déterminer leurs relations phylogénétiques parmi les lignées de MPXV de RCA et celles précédemment décrites en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest.
Des contaminations à la lisière des forêts tropicales suites à des mouvements de population
« Nos principaux résultats indiquent que les 10 isolats de RCA appartiennent à trois lignées étroitement liées à celles trouvées en RDC ainsi qu’à la forêt tropicale du bassin du Congo », explique Nicolas Berthet, chercheur à l’Institut Pasteur à Paris (unité Environnement et risques infectieux) et à l’Institut Pasteur de Shanghai - Académie chinoise des Sciences. « Comme la plupart des cas humains en RCA sont survenus à la lisière nord des forêts tropicales occidentales et orientales, la transmission à partir d’animaux sauvages vivant dans ces forêts est l’hypothèse la plus probable. De plus, les estimations de datation moléculaire suggèrent que les périodes d’instabilité politique intense ont entrainé des mouvements de population à l’intérieur du pays qui ont pu conduire à des contacts plus fréquents avec les animaux sauvages hôtes. »
La situation socio-économique de la RCA, les conflits armés et les perturbations écologiques majorent les interfaces et les interactions entre les populations humaines et les animaux sauvages augmentant ainsi le risque de zoonoses.
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Maladies infectieuses émergentes du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.
Source :
Genomic history of human monkey pox infections in the Central African Republic between 2001 and 2018, Scientific Reports, 22 juin 2021
Nicolas Berthet1,2,3*, Stéphane Descorps‑Declère4, Camille Besombes5, Manon Curaudeau6, Andriniaina Andy Nkili Meyong3, Benjamin Selekon7, Ingrid Labouba3, Ella Cyrielle Gonofio7, Rita Sem Ouilibona7, Huguette Dorine Simo Tchetgna3, Maxence Feher2, Arnaud Fontanet5,8, Mirdad Kazanji7, Jean‑Claude Manuguerra2, Alexandre Hassanin6, Antoine Gessain9,10 & Emmanuel Nakoune7
1The Center for Microbes, Development and Health, CAS Key Laboratory of Molecular Virology and Immunology, Institut Pasteur of Shanghai-Chinese Academy of Sciences, Discovery and Molecular Characterization of Pathogens, No. 320 Yueyang Road, XuHui District, Shanghai 200031, China.
2Institut Pasteur, Unité Environnement et Risque Infectieux, Cellule d’Intervention Biologique d’Urgence, Paris, France.
3Centre International de Recherches Médicales de Franceville (CIRMF), Franceville, Gabon.
4Institut Pasteur, Centre of Bioinformatics, Biostatistics and Integrative Biology (C3BI), Paris, France.
5Institut Pasteur, Emerging Diseases Epidemiology Unit, Paris, France.
6Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité (ISYEB), Sorbonne Université, MNHN, CNRS, EPHE, UA, Paris, France.
7Institut Pasteur de Bangui, Bangui, Central African Republic.
8Unité Pasteur-CNAM Risques Infectieux et Emergents (PACRI), Conservatoire National des Arts et Métiers, Paris, France.
9Institut Pasteur, Unité d’Epidémiologie et Physiopathologie des Virus Oncogènes, Département de Virologie, Paris, France.
10Centre National de Recherche Scientifique (CNRS) UMR3569, Paris, France.