Fabrice Chrétien a su très tôt qu’il serait chercheur. Aujourd’hui il est responsable du service de Neuropathologie à l’hôpital Sainte Anne à Paris et à la tête de sa propre unité de recherche à l’Institut Pasteur, ses travaux s’inspirent directement des problèmes de santé rencontrés par ses patients à l’hôpital.
C’est à l’école primaire que tout commence pour Fabrice. Il se passionne pour les sciences naturelles et rêve déjà du métier de chercheur. Dès qu’il en a l’occasion, il se rend aux journées portes ouvertes des instituts de recherche parisiens, notamment celles de l’Institut Pasteur. En classe de première, à l’heure ou l’on doit préparer ses choix, sa professeure de mathématiques lui conseille vivement de suivre un parcours en « médecine », qui lui permettra ainsi d’accéder un jour au métier de chercheur.
Découverte d’un laboratoire de recherche
En 1990, il entre en première année à la faculté de médecine de Créteil. Parallèlement, il envoie des courriers aux responsables d’unités de l’Institut Pasteur dans l’idée de décrocher un stage pendant les vacances d’été. C’est Daisy Roulland Dussoix, chef d’une unité de bactériologie qui lui permet d’accéder pour la toute première fois à la paillasse. Il réalise des tests pour mesurer l’efficacité d’antibiotiques, par la technique des antibiogrammes. Le travail n’est pas vraiment passionnant à ses yeux, mais qu’importe, c’est une première expérience, qu’il renouvellera chaque année à l’occasion des congés scolaires.
Une seconde rencontre va se révéler décisive : à l’hôpital Henri-Mondor, Françoise Gray, alors professeure en neuropathologie. C’est l’époque « des années de plomb du sida » comme l’appellent les médecins, une période où cette maladie ne connaît aucun traitement possible. Le virus du sida, s’attaquant au système immunitaire, laisse le champ libre de nombreuses maladies opportunistes. Les autopsies et les analyses sont nombreuses, Fabrice est volontaire, prêt à travailler. Sa tâche, au laboratoire, consiste à examiner au microscope des coupes de cerveau, à décrire ses observations et à diagnostiquer les maladies. Ces heures passées au microscope le passionnent, il apprend « à lire les échantillons » et mémorise de multiples informations au sujet des cellules et tissus malades, des compétences essentielles au métier d’histopathologiste (dont le métier est d’établir des diagnostics par l'étude microscopique des tissus).
A la fin de cette même année (1990), il écrit et publie son premier article.
Être sur le terrain
En 2000, il obtient son diplôme de médecin et devient assistant hospitalo-universitaire : il est à présent médecin et peut consacrer la moitié de son temps à ses recherches qu’il mène dans le service d’histologie de l’hôpital Henri-Mondor. Parallèlement, il exerce son activité de médecin, au sein du SMUR (Structure mobile d'urgence et de réanimation) puis en tant que médecin « senior » au Service d'aide médicale d'urgence (SAMU) de Pontoise.
« Ces années m’ont énormément marqué. Aujourd’hui encore lorsque j’entends la sirène d’un SMUR, mon cœur se serre ! Les responsabilités sont très lourdes, il faut faire des choix rapidement que l’on soit dans le véhicule ou appelés à gérer les équipes et les ressources. Et évidement, certains jours, il faut faire face à la mort. »
La recherche appliquée
En avril 2010, Fabrice Chrétien devient responsable de l’unité de recherche Histopathologie humaine et modèles animaux à l’Institut Pasteur. Une équipe de vingt personnes, composée de différents spécialistes : psychiatres, neurologues, réanimateurs, anesthésistes, qui consacrent la moitié de leur temps à l’hôpital et le reste de leur temps à faire de la recherche, mais aussi de techniciens et d’étudiants en thèse.
Actuellement, son équipe travaille sur deux thématiques. La première s’attèle à étudier les altérations du système nerveux central au cours de graves infections (septicémie), et la seconde s’intéresse à la capacité de réparations du tissu nerveux et musculaire lors de lésions. Ces recherches, en lien direct avec l’hôpital, sont cruciales pour mieux caractériser les dommages affectant les tissus et chercher des traitements permettant de les protéger et de les réparer.
« Certaines molécules sont à l’essai, nous cherchons des solutions pour traiter et guérir. C’est pour cette raison que nous avons besoin de médecins dans nos laboratoires. Leur proximité avec les patients et la maladie, ainsi que leurs connaissances cliniques sont précieuses pour mettre en place des solutions thérapeutiques applicables. »
Pour Fabrice, le métier de chercheur est difficile, voire parfois ingrat.
Fabrice Chrétien
Même lorsque l’on n’obtient pas le résultat attendu, il faut savoir s’étonner, se questionner », conclut-il. « Cela demande du temps, de la persévérance et il faut souvent faire et refaire des expériences sans jamais être tout à fait certain que cela fonctionne. En revanche, la plus grande satisfaction est de mettre en lumière un phénomène inexpliqué et de le comprendre.
La septicémie (appelé aussi sepsis) tue chaque année six millions de personnes à travers le monde. Le sepsis touche plutôt les âges extrêmes de la vie, les nouveau-nés (sepsis néonatal) et les seniors (comme le pape Jean-Paul II, emporté par un sepsis en 2005). Le sepsis peut aussi atteindre des personnes dans la force de l’âge, comme Agnès Souret, la première Miss France, décédée à 26 ans, ou encore l’acteur Guillaume Depardieu, disparu à 37 ans. |
Fabrice Chrétien en quelques dates :
2018 : Directeur de l’évaluation scientifique et du suivi des programmes de l’Inserm
Depuis 2013 : Professeur des universités et praticien hospitalier – Université Paris Descartes
2011-2013 : Professeur des universités et praticien hospitalier dans le service d’Anatomie pathologique, hôpital Raymond-Poincaré de Garches-université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
2012 : Responsable du service de Neuropathologie à l’hôpital Sainte Anne à Paris2008 : Habilitation à diriger les recherches
2010 : Responsable de l’unité de recherche Histopathologie humaine et modèles animaux à l’Institut Pasteur
2004 : Thèse de neurosciences2001 : DEA de neurosciences, école doctorale « 3C : Cerveau-Cognition-Comportement »
2000 : Lauréat de la faculté de médecine de Créteil
1999-2003 : Médecin senior au SAMU 95 / SMUR de Pontoise
1999 : Lauréat de l’Académie nationale de médecine