Le cerveau contient des cellules souches maintenues en dormance. Sous certaines conditions, ces cellules souches peuvent s’activer, se diviser et s’auto-renouveler ou produire de nouveaux neurones fonctionnels. Grâce à une technique d’imagerie, des chercheurs de l’Institut Pasteur ont identifié des paramètres cellulaires prédisant ces choix de destin.
Le cerveau est un organe complexe aux capacités d’adaptation surprenantes. La plasticité des synapses, notamment, permet à des ensembles de neurones de moduler leurs fonctions. Plus encore, à l’âge adulte, le cerveau contient une population de cellules souches, qui peuvent être activées et se diviser, pour se renouveler ou produire de nouveaux neurones qui vont enrichir les circuits cérébraux. Mais quels sont les conditions et mécanismes de ces choix de destin ?
Deux paramètres prédictifs du destin des cellules souches
Dans leur étude parue le 1er septembre 2023 dans la revue Science Advances, des chercheurs identifient deux paramètres prédisant le comportement des cellules souches neurales. Ils démontrent tout d’abord que le choix entre auto-renouvellement et engagement d’une cellule souche vers la production d’un neurone peut être prédit par la présence ou l’absence d’une protéine nommée DeltaA. Ils établissent par ailleurs que la probabilité d’activation des cellules souches neurales dépend de la taille de leur surface membranaire en contact avec le ventricule cérébral.
Pour parvenir à ces conclusions, les chercheurs ont eu recours à un modèle animal permettant un accès unique aux cellules souches neurales adultes in situ : le poisson zébré.
Etudier les cellules souches « en direct » grâce à l’imagerie intravitale
Etudier le comportement naturel des cellules souches neurales nécessite d’avoir accès à leur niche cérébrale sans lésion ni inflammation. Pour ce faire, les chercheurs ont mis à profit une méthode d’imagerie « intravitale » permettant de filmer les cellules souches neurales dans le cerveau de poisson adulte de façon non-invasive. « Pour filmer les cellules souches à travers la peau et le crâne dans un poisson endormi, sans endommager les tissus, nous avons utilisé la microscopie biphotonique. Nous avons ainsi suivi et analysé le comportement de près de 1000 cellules souches pendant près de 60 jours », explique Nicolas Dray, co-auteur correspondant de l’étude.
Maîtriser le destin des cellules souches neurales
Les cellules souches neurales constituent aujourd’hui un espoir thérapeutique pour régénérer des neurones chez des patients atteints de lésions cérébrales ou de dégénérescences. Un défaut dans la régulation des cellules souches neurales peut aussi être à l’origine de certains cancers. Les résultats de cette étude pourraient permettre un jour de mieux maitriser ces cellules et leurs choix de destin in vivo, un espoir pour de futurs traitements.
Cette étude a été soutenue par le LabEx Revive et réalisée en collaboration avec les équipes de Y. Bellaiche (Institut Curie), E. Beaurepaire (Ecole Polytechnique), F. Cheysson (Université Gustave Eiffel), C. Baroud (Institut Pasteur) et J-Y. Tinevez (Institut Pasteur).
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Maladies de la connectivité cérébrale et maladies neurodégénératives du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.
A propos de la technique d’imagerie intravitale biphotonique :
Parmi les techniques optiques d’étude du vivant, la microscopie de fluorescence par excitation à deux photons permet une imagerie tridimensionnelle en profondeur dans les tissus biologiques.
Source :
Apical size and deltaA expression predict adult neural stem cell decisions along lineage progression, Science Advances, 1er septembre 2023