En analysant le génome de la bactérie Legionella pneumophila, l’équipe de Carmen Buchrieser, chef de l’unité de Biologie des bactéries intracellulaires (Institut Pasteur/CNRS), a a identifié des gènes codant des protéines pouvant participer à l’infection de cellules humaines : celles-ci ressemblent à des protéines d’organismes supérieurs (eucaryotes), tels que l’Homme, et peuvent modifier la physiologie des cellules hôtes. Elles constituent donc des facteurs de virulence potentiels. Dans cette étude publiée dans PNAS, les chercheurs montrent qu’une de ces protéines est secrétée dans la cellule humaine et qu’elle aide à bloquer la réponse antibactérienne de la cellule.
La légionellose a touché plus de 1300 personnes en France en 2014 et provoqué près de 130 décès. Elle sévit notamment depuis 2014 aux Etats-Unis à Flint (Michigan) où elle a été diagnostiquée chez 87 personnes, ou encore au Portugal où plus de 300 personnes ont été infectées, dont sept sont décédées. Cette maladie émergente est causée par Legionella pneumophila, bactérie environnementale qui se développe dans les circuits d’eau chaude. Legionella pneumophila est une bactérie intracellulaire, qui met en place un système sophistiqué d’attaque. Lors de l’analyse de son génome, l’équipe de Carmen Buchrieser, chef de l’unité de Biologie des bactéries intracellulaires (Institut Pasteur / CNRS), a identifié des gènes codant des protéines pouvant participer à l’infection de cellules humaines : celles-ci ressemblent à des protéines d’organismes supérieurs (eucaryotes), tels que l’Homme, et peuvent modifier la physiologie des cellules hôtes. Elles constituent donc des facteurs de virulence potentiels. Dans cette étude publiée dans PNAS, les chercheurs montrent qu’une de ces protéines est secrétée dans la cellule humaine et qu’elle aide à bloquer la réponse antibactérienne de la cellule.
Grâce à ce travail collaboratif, les scientifiques issus d’équipes internationales ont mis en évidence que la bactérie Legionella pneumophila (procaryote) a acquis un gène eucaryote codant pour un acteur important dans le métabolisme des lipides de la membrane des cellules humaines. Pour la première fois ce travail a montré un remaniement du métabolisme des lipides dans la cellule hôte induit au cours de l’infection bactérienne. Plus particulièrement, les chercheurs ont identifié et mis en évidence le rôle d’un acteur spécifique, une sphingosine-1 phosphate lyase, produit par cette bactérie (LpSpl), en tant que responsable de ce remaniement métabolique dans la cellule. Les chercheurs ont résolu la structure de cette protéine et ils ont observé qu’elle est parfaitement conservée avec son homologue eucaryote. Ceci suggère qu’une des stratégies de virulence de Legionella pneumophila serait de mimer les fonctions des protéines de l’Homme.
Afin de caractériser de façon complète l’activité de cette protéine au cours de l’infection les chercheurs ont étudié son rôle fonctionnel et ont découvert qu’il a un effet majeur sur la réponse autophagique dans la cellule hôte, c’est-à-dire sur le processus de dégradation des protéines cellulaires ainsi que des bactéries pathogènes envahissantes. En bloquant le mécanisme de défense cellulaire basé sur l’autophagie, la bactérie arrive à éviter sa dégradation par la cellule. Ce mécanisme contribuant au développement de la légionellose a pu être confirmé dans un modèle d’infection murin.
Source
Legionella pneumophila S1P-lyase targets host sphingolipid metabolism and restrains autophagy, PNAS, 1er février 2016.
Monica Rolandoa,b,1, Pedro Escolla,b,1, Tamara Noraa,b, Joëlle Bottic,d, Valérie Boitezc,d, Carmen Bediae,2, Craig Danielsf,3, Gilu Abrahamg, Peter J. Stogiosf, Tatiana Skarinaf, Charlotte Christophea,b, Delphine Dervins-Ravaulta,b, Christel Cazaleta,b, Hubert Hilbih, Thusitha W. T. Rupasinghei, Dedreia Tulli, Malcolm J. McConvillei,j, Sze Ying Ongk, Elizabeth L. Hartlandk, Patrice Codognoc,d, Thierry Levadee, Thomas Nadererg, Alexei Savchenkof, and Carmen Buchriesera,b
(a) Institut Pasteur, Biologie des Bactéries Intracellulaires, Paris, France
(b) CNRS UMR 3525, 75724 Paris, France
(c) Institut Necker Enfants-Malades, INSERM U1151-CNRS UMR 8253, France
(d) Université Paris Descartes-Sorbonne Paris Cité, Paris, France
(e) INSERM UMR1037, Centre de Recherches en Cancérologie de Toulouse, Toulouse, France
(f) Department of Chemical Engineering and Applied Chemistry, University of Toronto, Toronto, Canada
(g) Department of Biochemistry and Molecular Biology and the Biomedicine Discovery Institute, Monash University, VIC, Australia
(h) Institute of Medical Microbiology, University of Zürich, Switzerland
(i) Metabolomics Australia, Bio21 Molecular Science and Biotechnology Institute, The University of Melbourne, VIC, Australia
(j) Department of Biochemistry and Molecular Biology, The University of Melbourne, VIC, Australia
(k) Department of Microbiology and Immunology, University of Melbourne at the Peter Doherty Institute for Infection and Immunity, VIC, Australia
(1) M.R. and P.E. contributed equally to this work.
(2) Present address: Institute of Environmental Assessment and Water Research (IDAEACSIC), Barcelona, Spain.
(3) Present address: Hospital for Sick Children, Toronto, Ontario, Canada.
Mis à jour le 03/02/2016