Une étude menée par le groupe de Marc Lecuit (Avenir Inserm/Groupe Microorganismes et Barrières de l'hôte de l'Institut Pasteur), au sein de l'unité Inserm U604 dirigée par Pascale Cossart , a permis de découvrir comment la bactérie responsable de la listériose (Listeria monocytogenes) est capable de traverser le placenta de la femme enceinte pour provoquer des infections graves - voire mortelles - du fœtus, des naissances prématurées et des infections chez le nouveau-né. C'est la première fois que le mécanisme moléculaire permettant à une bactérie pathogène de franchir le placenta in vivo est ainsi découvert. Ces travaux sont publiés le 17 septembre dans la revue Nature.
Communiqué de presse
Paris, le 17 septembre2008
La listériose est une infection bactérienne d’origine alimentaire causée par Listeria monocytogenes. Largement répandue dans la nature (eau, sol, végétaux, animaux) cette bactérie peut contaminer de nombreux aliments : légumes crus, plats cuisinés prêts à la consommation, fromage, charcuterie et menace en premier lieu les femmes enceintes, les enfants à naître et les nouveau-nés. Les personnes âgées et immunodéprimées sont également des sujets à risque. Chez ces derniers la listériose est responsable de septicémies, de méningites et d’encéphalites. L’antibiothérapie est dans la plupart des cas efficace mais l’infection reste mortelle chez 20 à 30% des individus infectés. Chez l’adulte sain, les symptômes sont en général moins graves et peuvent se traduire par une simple gastro-entérite.
L’infection débute par l’ingestion d’aliments contaminés par Listeria monocytogenes, qui peut ensuite traverser la barrière intestinale et atteindre la circulation sanguine. La bactérie est alors capable de passer la barrière séparant les vaisseaux sanguins du cerveau (barrière hémato-encéphalique) ou de traverser le placenta pour atteindre le fœtus chez la femme enceinte.
Marc Lecuit, Pascale Cossart et leurs collègues de l’Institut Pasteur, de l’Inserm et de l’INRA viennent de mettre au point les deux premiers modèles animaux de listériose humaine permettant d’étudier le franchissement placentaire in vivo : la gerbille, un rongeur naturellement sensible à Listeria monocytogenes, et une nouvelle souris génétiquement modifiée par « knock-in ». Cette souris exprime une protéine humaine d’adhérence présente à la surface des cellules épithéliales : la E-cadhérine. Grâce à ces deux modèles animaux, les chercheurs ont pu mettre en évidence que deux protéines de la Listeria appelées InlA et InlB, interagissent avec des récepteurs spécifiques, respectivement la E-cadherine et Met, qui, leur permettent de se coller au placenta et de le traverser.
Si les chercheurs avaient précédemment étudié in vitro les interactions de ces protéines avec leurs récepteurs et montré en 2001 comment la Listeria franchissait la barrière intestinale, c’est la première fois que le mécanisme moléculaire permettant à une bactérie pathogène de franchir la barrière placentaire in vivo est découvert.
Ces travaux permettent de mieux comprendre le pouvoir pathogène de Listeria monocytogenes et d’envisager des molécules capables d’empêcher Listeria d’atteindre le foetus. La compréhension du mécanisme de franchissement du placenta pourrait également permettre de délivrer des molécules thérapeutiques passant à travers celui-ci.
Parallèlement à ces travaux, les équipes de Marc Lecuit et Pascale Cossart travaillent ensemble à la compréhension du mécanisme de franchissement de la barrière hémato-encéphalique par Listeria monocytogenes. Leur hypothèse de travail est que ces mêmes protéines pourraient également jouer un rôle dans l’infection du système nerveux central.
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Marc Lecuit est également responsable du Centre National de Référence des Listeria, et PU-PH dans le service des maladies infectieuses et tropicales de l’Hôpital Necker-Enfants malades, Université Paris Descartes.
Pascale Cossart dirige l’unité « Interactions bactéries-cellules » à l’Institut Pasteur, également unité Inserm U 604 et unité Inra USC2020. Elle est Professeur à l’Institut Pasteur, directrice du Département de Biologie cellulaire et Infection de l’Institut Pasteur et investigatrice internationale du Howard Hughes Medical Institute.
Pour en savoir plus sur la listeriose
Source
“Conjugated action of two species-specific invasion proteins for fetoplacental listeriosis”, Nature, 17 septembre 2008.
Olivier Disson 1,2*, Solène Grayo 1,2,3*, Eugénie Huillet 4,5,6*, Georgios Nikitas 1,2, Francina Langa-Vives 7, Olivier Dussurget 4,5,6, Marie Ragon 3, Alban Le Monnier 3, Charles Babinet 8‡, Pascale Cossart 4,5,6 & Marc Lecuit 1,2,3,9
1 Institut Pasteur, Groupe Microorganismes et Barrières de l’Hôte, Unité des Interactions Bactéries-Cellules, F-75015, Paris, France.
2 Inserm Avenir U604, F-75015, Paris, France.
3 Institut Pasteur, Centre de Référence des Listeria, F-75015, Paris, France.
4 Institut Pasteur, Unité des Interactions Bactéries-Cellules, F-75015, Paris, France.
5 Inserm U604, F-75015, Paris, France.
6 INRA USC2020, F-75015, Paris, France.
7 Institut Pasteur, Centre d’Ingénierie Génétique Murine, F-75015, Paris, France.
8 Institut Pasteur, Unité de Biologie du Développement, F-75015, Paris, France.
9 Centre d’Infectiologie Necker-Pasteur, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Hôpital Necker-Enfants malades, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Université Paris Descartes, F-75015, Paris, France.
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