L’analyse des images biologiques par des méthodes mathématiques, d’intelligence artificielle et de vision par ordinateur est devenue un outil indispensable à la recherche en biologie et sert comme un vecteur puissant de découvertes. Des chercheurs de l’unité «Analyse d’Images Biologiques» viennent de publier, dans Patterns (Cell Press)1, les résultats d’une recherche multidisciplinaire enrichie de l’analyse quantitative d’images aidant à la compréhension de la motilité cellulaire.
Des chercheurs de l’Institut Pasteur proposent un schéma robuste regroupant les opérations à mettre en oeuvre pour réaliser l’analyse exhaustive d’images de cellules en mouvement, et comprendre des phénomènes multi-factoriels et non linéaires par nature.
Un enjeu de taille pour la recherche
En biologie, l'image ou le signal provenant de microscopes sont numérisés pour être traités par informatique afin d’obtenir une caractérisation quantitative des phénomènes à l’étude. Dans cet article est abordée la question de comment l'analyse quantitative des images provenant de cellules en mouvement a enrichi les connaissances des processus invasifs cellulaires. L’intérêt des chercheurs se porte en effet sur le mouvement et la migration de cellules dont les données les plus récentes conduisent vers l’implémentation de systèmes expérimentaux complexes afin de reproduire des conditions physiologiquement pertinentes. C’est un enjeu de taille à l’heure d’élucider comment les organismes pathogènes - virus, bactéries et parasites – pénètrent, se déplacent et envahissent les tissus humains.
La diversité de la motilité cellulaire nécessite des stratégies diverses de quantification
Lorsqu’il s’agit de disséquer la machinerie moléculaire sous-jacente au mouvement de cellules, la recherche est impactée par la combinaison d’au moins trois démarches théoriques et expérimentales : l’imagerie au microscope, les lois de la physique, et l’architecture spatiale combinée à la nature chimique de l’environnement extracellulaire. Le traitement quantitatif des images contribue à l'objectivité et à la reproductibilité de cette science éminemment qualitative. Cependant, il n'existe à ce jour aucun modèle mathématique qui intègre la grande diversité des mécanismes biologiques nécessaires pour prédire complètement la migration cellulaire.
Détection, caractérisation et suivi des cellules en imagerie microscopique
Les expériences menées au cours du temps par les auteurs ont évolué en interaction intime avec les techniques de traitement d'images. Des algorithmes permettant la détection et la segmentation des cellules en tant qu’objets indépendants, le suivi temporel de leur déplacement, et la définition de descripteurs de morphologie ont été développés.
Par l’étude du mouvement amiboïde comme facteur guidant l’infection intestinale par des amibes pathogènes, ces méthodes d’analyse d’images ont aidé à illustrer comment une quantification appropriée du comportement de cellules approfondissent les données biologiques : par exemple, en choisissant des représentations mathématiques qui amplifient des différences initialement subtiles, en découvrant statistiquement des lois générales de leur déplacements en deux ou trois dimensions et en milieu confiné (comme les tissus), ou en intégrant une vision physique de phénomènes2,3. Dans les recherches en cours, les auteurs mettent en lumière le caractère non invasif de l'imagerie quantitative qui est en train de fertiliser deux domaines florissants. Le premier domaine est la mécanobiologie où de nombreuses mesures biophysiques restent inaccessibles. Le deuxième domaine est la fabrication de micro-environnements en trois dimensions, où la recherche de la pertinence physiologique lors d’un phénomène de choix a fait exploser le volume des données informatiques.
Sources
[1]. Bioimage Analysis and Cell Motility. Patterns, Volume 2, Issue 1, 2021
Aleix Boquet-Pujadas,1,2,3 Jean-Christophe Olivo-Marin,1,2,* and Nancy Guillen 1,4
1Institut Pasteur, Bioimage Analysis Unit, 25 rue du Dr. Roux, Paris Cedex 15 75724, France
2Centre National de la Recherche Scientifique, CNRS UMR3691, Paris, France
3Sorbonne Universite, Paris 75005, France
4Centre National de la Recherche Scientifique, CNRS ERL9195, Paris, France
*Correspondence: jcolivo@pasteur.fr
https://doi.org/10.1016/j.patter.2020.100170
[2] BioFlow: a non-invasive, image-based method to measure speed, pressure and forces inside living cells. Sci Rep. 2017 7(1):9178, Boquet-Pujadas A1,2,7, Lecomte T1,2,7, Manich M 1,2, Thibeaux R 3,4,5, Labruyère E 1,2, Guillén N 3,4,6, Olivo-Marin JC 11,2, Dufour AC 1,2
1 Institut Pasteur, Bioimage Analysis Unit, Paris, France.
2 CNRS UMR3691, Paris, France.
3 Institut Pasteur, Cell Biology of Parasitism Unit, Paris, France.
4 INSERM U786, Paris, France.
5 Institut Pasteur, Leptospirosis Research Unit, New Caledonia.
6 CNRS ERL9195, Paris, France.
7Aleix Boquet-Pujadas and Timothée Lecomte contributed equally to this work.
Corresponding author: Jean-Christophe Olivo-Marin
email: jcolivo@pasteur.fr
[3] E-cadherin focuses protrusion formation at the front of migrating cells by impeding actin flow. Nature Communications volume 11, 2020 Cecilia Grimaldi, Isabel Schumacher, Aleix Boquet-Pujadas, Katsiaryna Tarbashevich, Bart Eduard Vos, Jan Bandemer, Jan Schick, Anne Aalto, Jean-Christophe Olivo-Marin, Timo Betz & Erez Raz
https://doi.org/10.1038/s41467-020-19114-z