Les maladies auto-inflammatoires, tout comme les maladies auto-immunes, sont des pathologies résultant d’un dysfonctionnement du système immunitaire. Ces maladies évoluent en maladies inflammatoires chroniques. Des chercheurs de l’Institut Pasteur ont observé qu’un sucre naturel de la paroi des levures pourrait réduire la sur-inflammation dans certaines de ces maladies, et donc servir de traitement.
Lorsque les anticorps d’une personne s’attaquent aux constituant normaux de l’organisme, aussi appelés auto-anticorps, ils entrainent des maladies dites auto-immunes. Dans certains cas, on ne trouve pas d’auto-anticorps, et on parle alors plutôt de maladies « auto-inflammatoires ». Ce sont alors des cellules immunitaires de la première ligne de défense de l’organisme (neutrophiles, macrophages, monocytes, lymphocytes NK -cellules tueuses naturelles-, …) qui déclenchent à elles seules une inflammation chronique conduisant à la destruction de certains tissus.
Le rôle de l’inflammasome et d’IL-1β dans les maladies auto-inflammatoires
Certaines maladies auto-inflammatoires sont liées à une activation de l’inflammasome, un ensemble de protéines associé à l’immunité innée, et plus particulièrement d’IL-1β, une cellule immunitaire liée à l’inflammation.
Parmi ces maladies, se trouve le syndrome périodique associé à la cryopyrine (CAPS). Il s’agit d’un groupe de maladies auto-inflammatoires caractérisé par des épisodes récurrents de fièvre / fébrilité, et de manifestations inflammatoires systémiques (myalgies, conjonctivite, etc.) sans infection (source Orphanet). « Chez les patients atteints de syndrome CAPS, des mutations dites ‘gain de fonction’ [causant une activité plus élevée, NDLR] au niveau de l’inflammasome entraînent une augmentation de la sécrétion d’IL-1b et une inflammation dérégulée », explique Jessica Quintin, chef de l’unité Immunologie des infections fongiques à l’Institut Pasteur. Les traitements disponibles contre ce syndrome ciblent aujourd’hui directement la protéine IL-1b, mais ne traitent pas la dérégulation en amont.
Le b-glucan réduit la sursécrétion d’IL-1β
Un sucre naturel de la paroi des levures, appelé b-glucan, contribue au déclenchement de la mémoire immunitaire innée lorsqu’il entre en contact avec des cellules immunitaires. Cela induit une modification des cellules immunitaires telles que les macrophages. Des études précédentes ont montré que la mémoire immunitaire innée induite par le b-glucan confère une protection contre les infections secondaires microbiennes.
Des chercheurs de l’Institut Pasteur ainsi que de l’East Tennessee State University, et de l’AP-HP ont cherché quel était l’impact du b-glucan sur les maladies auto-inflammatoires. « Nous avons, dans notre étude, constaté que l'activation de l'inflammasome et la production d’IL-1β qui s’en suit étaient réduites dans les macrophages exposés au β-glucan. Le b-glucan réduit la signalisation inflammatoire en amont de l’inflammasome », détaille Jessica Quintin. La mémoire induite par le b-glucan fonctionne également chez les patients atteints du syndrome CAPS, réduisant donc l’activation de l’inflammasome dans les macrophages et la sursécrétion d’IL-1β.
Le β-glucan reprogramme les macrophages en réduisant la signalisation inflammatoire en amont de l’inflammasome NLRP3 diminuant la production d’IL-1β. Crédit : Institut Pasteur, Jessica Quintin
Ces résultats démontrent que la mémoire immunitaire innée, induite par le b-glucan, empêche la sursécrétion d’IL-1β et que le b-glucan pourrait potentiellement être utilisée en clinique dans les maladies provoquées par l’inflammasome, comme le CAPS.
Source :
β-Glucan–induced reprogramming of human macrophages inhibits NLRP3 inflammasome activation in cryopyrinopathies The Journal of Clinical Investigation, 27 July 2020
Giorgio Camilli1 , Mathieu Bohm1 , Alícia Corbellini Piffer1,2 , Rachel Lavenir1 , David L. Williams3 , Benedicte Neven4 , Gilles Grateau5 , Sophie Georgin-Lavialle5 , and Jessica Quintin1
1Immunology of Fungal Infections, Department of Mycology, Institut Pasteur, Paris, France.
2Instituto de Microbiologia Paulo de Góes (IMPG), Universidade Federal do Rio de Janeiro, Rio de Janeiro, Brazil.
3Department of Surgery, Center of Excellence in Inflammation, Infectious Disease and Immunity, James H. Quillen College of Medicine, East Tennessee State University, Johnson City, Tennessee, USA.
4Pediatric Hematology-Immunology and Rheumatology Department, Necker-Enfants Malades Hospital, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (APHP), Paris, France.