Les leptospires pathogènes sont responsables de la leptospirose, qui sévit dans les différentes régions du monde. Cette maladie est une zoonose, c’est-à-dire qu’elle implique des animaux sauvages ou domestiques mais peut être transmise à l’Homme. Une collaboration de l’Institut Pasteur et de l’INRS-Centre Armand Frappier Santé-Biotechnologie a mené à la découverte d’un nouveau mécanisme de modulation de la virulence de cette bactérie.
La leptospirose est une zoonose émergente dans le monde. Il a été estimé que la leptospirose pourrait être à l’origine de plus d’un million de cas sévères par an, dont 60 000 décès. En France métropolitaine, la leptospirose atteint une incidence record de 1 cas pour 100000 habitants depuis 2014 (voir fiche maladie Leptospirose de l'Institut Pasteur). Dans les régions tropicales, comme les départements et collectivités français d’outre-mer, la population est plus largement exposée et la leptospirose est un problème de santé publique majeur. Malgré cela, la leptospirose est une maladie négligée et les leptospires sont des bactéries peu étudiées alors qu’elles possèdent des caractéristiques uniques dans le monde bactérien.
L’étude du méthylome de Leptospira interrogans dévoile un mécanisme de régulation de la virulence
Des chercheurs de l’Institut Pasteur (Paris) et de l’INRS-Centre Armand Frappier Santé-Biotechnologie ont analysé le méthylome de la bactérie Leptospira interrogans, responsable des formes les plus sévères de leptospirose. En effet, dans l’ADN, un groupement méthyl peut être ajouté à certaines bases. Ce processus épigénétique est appelé la méthylation, et réalisé par des enzymes appelées méthyltransférases. Les chercheurs ont montré qu’une méthyltransférase est responsable de la méthylation des bases cytosines en position 4 (m4C) des sites CTAG. Ce type de méthylation est uniquement retrouvé dans les génomes des bactéries et des archées et son rôle reste méconnu chez ces organismes. L’inactivation du gène codant cette méthyltransférase entraîne une dérégulation massive de l’expression des gènes de L. interrogans et une perte de la virulence dans le modèle animal.
Ces recherches dévoilent un nouveau mécanisme de régulation d’expression des gènes et de modulation de la virulence par méthylation de l’ADN. Il est possible que cette stratégie soit utilisée par d’autres pathogènes bactériens.
Source
4-methylcytosine DNA modification is critical for global epigenetic regulation and virulence in the human pathogen Leptospira interrogans, Nucleic Acids Research, 9 novembre 2020
Robert A. Gaultney1, Antony T. Vincent2, Céline Lorioux1, Jean-Yves Coppée3, Odile Sismeiro3, Hugo Varet3,4, Rachel Legendre3,4, Charlotte A. Cockram5, Frédéric J. Veyrier2, Mathieu Picardeau1
1 Unité Biologie des Spirochètes, Institut Pasteur, Paris, France
2 Bacterial Symbionts Evolution, INRS-Centre Armand-Frappier, Laval, Quebec, Canada
3 Transcriptome and Epigenome Platform, Biomics, Center for Technological Resources and Research (C2RT), Institut Pasteur, Paris, France
4 Biomics Technological platform, Center for Technological Resources and Research, Institut Pasteur, Paris, France
5 Spatial Regulation of Genomes Unit, Institut Pasteur, Paris, France