Le laboratoire de Découverte de pathogènes de l’Institut Pasteur et le laboratoire de neuropathologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière ont initié une recherche de pathogènes dans des cas d’encéphalites mortelles d’origine inconnue. Chez deux patients immunodéprimés, le virus Umbre (genre orthobunyavirus) a été identifié. Ce virus infecte les neurones du cortex cérébral (il est dit neurotrope), la moelle épinière et le foie. Cette découverte d’un nouvel arbovirus responsable d’encéphalite, et son existence en France, revêt un intérêt particulier en matière de santé publique.
Les encéphalites humaines sont un syndrome dont la cause reste inconnue dans plus d’un tiers des cas. Toute nouvelle identification de pathogène responsable d’encéphalite peut donc améliorer l’efficacité diagnostique et la prise en charge médicale des patients.
Le laboratoire de Découverte de pathogènes, dirigé par Marc Eloit à l’Institut Pasteur, associé à plusieurs équipes de chercheurs de l’Institut Pasteur ainsi que le laboratoire de neuropathologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, dirigé par Danielle Seilhean, ont initié une recherche de pathogènes dans des cas d’encéphalites mortelles d’origine inconnue basée sur l’analyse par séquençage à haut débit du tissu cérébral. Le séquençage a été réalisé sur les équipements de la plateforme Biomics de l’Institut Pasteur.
Chez deux patients immunodéprimés, le virus Umbre, un virus du genre orthobunyavirus, a été identifié. Le virus infecte des neurones du cortex cérébral (voir image), la moelle épinière et le foie deses patients
Le virus Umbre a été décrit initialement dans les années 1970 dans des populations de moustiques Culex en zone Asie Pacifique, mais n’avait auparavant ni été isolé chez des mammifères (dont l’homme), ni détecté en Europe.
L’infection par le virus Umbre de deux patients français, dont l’un vivait dans la région Occitanie et n’avait jamais voyagé en dehors de France métropolitaine, et l’autre avait fait une croisière en méditerranée avant l’apparition des symptômes, a conduit les chercheurs à rechercher l’origine de la contamination dans des moustiques. Cette investigation réalisée en partenariat avec le CIRAD de Montpellier et l’EID Méditerranée a permis d’identifier des séquences du genre orthobunyavirus très proches du virus Umbre dans des moustiques Culex de Camargue.
Une enquête sérologique par un test développé à l’Institut Pasteur sur une population du sud de la France composée d’environ 300 personnes « contrôles » et d’une vingtaine de cas « encéphalites » n’a pas mis en évidence de réponse anticorps contre le virus Umbre. Ce résultat suggère que la fréquence de l’infection dans la population générale est au plus faible, ce qui ne reflète donc pas le risque pour les personnes immunodéprimées.
Cette découverte d’un nouvel arbovirus responsable d’encéphalite, et son existence en France représente un intérêt particulier en matière de santé publique, et met l’accent sur la synergie entre les cliniciens et les microbiologistes dans la découverte d’agents pathogènes.
Source
Identification of Umbre Orthobunyavirus as a Novel Zoonotic Virus Responsible for Lethal Encephalitis in 2 French Patients with Hypogammaglobulinemia, Clinical Infectious Diseases, 9 juin 2020.
Philippe Pérot,1 Franck Bielle,2,3 Thomas Bigot,4, Vincent Foulongne,5 Karine Bolloré,5 Delphine Chrétien,1 Patricia Gil,6,7 Serafín Gutiérrez,6,7, Grégory L’Ambert,8 Karima Mokhtari,2,3 Jan Hellert,9 Marie Flamand,9 Carole Tamietti,9 Muriel Coulpier,10 Anne Huard de Verneuil,10 Sarah Temmam,1, Thérèse Couderc,11 Edouard De Sousa Cunha,2 Susana Boluda,2,3,12, Isabelle Plu,2,3,12 Marie Bernadette Delisle,13 Fabrice Bonneville,14 David Brassat,15, Claire Fieschi,16 Marion Malphettes,16 Charles Duyckaerts,2,3 Bertrand Mathon,3,17, Sophie Demeret,18 Danielle Seilhean,2,3,12 and Marc Eloit1,19
1. Pathogen Discovery Laboratory, Institut Pasteur, Paris, France,
2. Raymond Escourolle Neuropathology Department, AP-HP-Sorbonne, Pitié-Salpêtrière University Hospital, Paris, France,
3. Sorbonne University, Brain Institute (ICM; INSERM, UMRS 1127; CNRS, UMR 7225), Paris, France,
4. Bioinformatics and Biostatistics Hub–C3BI, Institut Pasteur, USR 3756, CNRS, Paris, France,
5. Pathogenesis and Control of Chronic Infections, INSERM, University of Montpellier, French Blood Service, Montpellier University Hospital, Montpellier, France,
6. CIRAD, UMR ASTRE, Montpellier, France,
7. ASTRE, CIRAD, INRA, University of Montpellier, Montpellier, France,
8. EID Méditerranée, Montpellier, France,
9. Structural Virology Unit, Institut Pasteur, CNRS UMR 3569, Paris, France,
10. UMR Virologie, ANSES, ENVA, INRAE, UPE, Alfort National Veterinary School, Maisons-Alfort, France,
11. Biology of Infection Unit, Institut Pasteur, INSERM U1117, Paris, France,
12. CNR ATNC (Reference Center for Nonconventional Transmissible Agents), Laboratory and Neuropathology Network for the Surveillance of Creutzfeldt-Jakob Disease, Santé Publique France, AP-HP, Paris, France,
13. Neuropathology Laboratory, University Laboratory of Pathological Anatomy and Cytology, Toulouse University Hospital, Toulouse III – Paul Sabatier University, Toulouse, France,
14. Department of Neuroradiology, Toulouse University Hospital and UMR 1214 ToNIC, University of Toulouse, INSERM, Toulouse, France,
15. CRC-SEP, Neurosciences Pole, Toulouse University Hospital and UMR 1043, University of Toulouse III, Toulouse, France,
16. Department of Clinical Immunology, Saint-Louis Hospital, Paris Public Hospital Network (AP-HP), University of Paris, Paris, France,
17. AP-HP, Pitié-Salpêtrière Charles-Foix University Hospital, Department of Neurosurgery, Paris, France,
18. Department of Neurology, Neuro ICU, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Paris, France,
19. Alfort National Veterinary School, Maisons-Alfort, Maisons-Alfort, France
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Maladies infectieuses émergentes du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.