Pour la première fois en France métropolitaine, des personnes ont contracté le virus Zika. Par opposition aux cas dits « importés », ceux qui déclarent la maladie lors d’un retour de voyage, ces cas révèlent des infections contractées suite à la piqûre d’un moustique sur le territoire français. Si les personnes sont depuis guéries, ces cas autochtones inquiètent les autorités sanitaires. A cette occasion, des experts de l’Institut Pasteur ont rappelé les risques d’une contamination par le virus et les recommandations à suivre pour se protéger.
Le lundi 21 octobre 2019. L’Agence régionale de santé (ARS) de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur a fait état d’un deuxième cas d’infection par le virus Zika dans le sud de la France. Cela fait suite à une première contamination dans la même région. Les deux patients, qui vivent à moins de 100 mètres de distance, ont déclaré leurs symptômes au cours de la première quinzaine du mois d’août, le deuxième cas n’ayant été détecté que lors de l’enquête porte à porte réalisée début octobre lors de l’investigation du premier cas. Les deux personnes en question ont contracté la maladie suite à la piqûre du moustique tigre, Aedes albopictus, insecte vecteur du virus Zika. Depuis, l’ARS a annoncé un troisième cas autochtone de contamination par le virus Zika au même endroit (la ville de Hyères), le 31 octobre.
Rappelons que le ministère chargé de la santé, dans sa carte de répartition du moustique tigre en France, comptabilisait 51 départements classés en « vigilance rouge » fin avril, soit neuf de plus qu’en 2018. « Les moustiques tigre ont été détectés pour la première fois en 1979 en Europe et en 2004 en France. Ils sont quasiment en activité pendant tout l'été », souligne Anna-Bella Failloux, responsable de l’unité des Arbovirus et insectes vecteurs à l’Institut Pasteur, dans une interview pour FranceInfo TV. D’ailleurs, la colonisation du territoire français par le moustique tigre s’étend et il n’y a, à ce jour, plus de département en simple veille sanitaire ou vigilance verte.
« Aujourd’hui, c’est la première fois que le moustique tigre, Aedes Albopictus, est capable de transmettre, en conditions naturelles, le virus Zika en France », s’inquiète Arnaud Fontanet, responsable de l’unité d’Epidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur, lors de son interview pour RTL. « Nous savions, à partir de travaux de laboratoire, que cela était possible, mais cela n’avait jamais été le cas en populations naturelles », poursuit-il.
« Ce qui est étonnant, c'est qu’il y a eu des centaines de cas importés qui sont venus en France, notamment via la Martinique et de Guadeloupe, mais il n'y a eu aucun cas autochtone en France ! Aujourd'hui, on a assez peu de foyers de Zika dans le monde et pas de grandes épidémies. Il va donc falloir déterminer comment ont été infectés les moustiques-tigres qui ont transmis le virus en France pour la première fois », poursuit Anna-Bella Failloux.
Le moustique tigre dans le viseur des chercheurs
Mais qui est donc Aedes Albopictus, aussi appelé moustique tigre ? Reconnaissable par la présence d’une ligne médiane d’écailles blanches sur le thorax. Aedes albopictus est une espèce généraliste car capable de coloniser des gîtes larvaires naturels et créés par l’homme Ces caractéristiques confèrent donc au moustique tigre la possibilité de coloniser des environnements humains et même au-delà. Dans ce contexte, Aedes albopictus peut alors devenir le vecteur de maladies infectieuses comme Zika, mais également la dengue ou le virus du chikungunya. « Lors d’une infection par ces virus, on retrouve fréquemment une fièvre, une éruption cutanée, des douleurs articulaires, et une conjonctivite. Il y a donc un faisceau de symptômes similaires entre ces maladies. Pour Zika, l’éruption cutanée est souvent au premier plan, les symptômes sont en général plus bénins, et disparaissent au bout de quelques jours », précise Arnaud Fontanet.
Cependant, certaines complications peuvent être observées, en particulier chez les femmes enceintes. « Environ 5% des enfants nés de mères infectées pendant la grossesse peuvent être atteints d’anomalies neurologiques congénitales, dont la microcéphalie, avec un risque plus important si l’infection a eu lieu au premier trimestre de la grossesse », explique Anna-Bella Failloux. « Il existe également un faible de risque de transmission par le lait maternel, ajoute-t-elle, mais aussi de l’homme à la femme par voie sexuelle, le sperme pouvant contenir le virus Zika pendant six mois. A partir de son infection, la femme est, elle, contagieuse pendant deux semaines ».
Pourtant, une épidémie n’est pas à craindre fin octobre, car la saison se termine pour les moustiques. « Aedes albopictus est surtout actif entre mai en novembre. Les cas autochtones détectés datent du mois d’août 2019. Le temps que le bilan et la confirmation des cas se fassent, la nouvelle nous est parvenue un peu plus tard. » rapporte Arnaud Fontanet.
Toutefois, la présence du moustique étant de plus en plus importante en métropole, il est possible d’être confronté plus souvent à des personnes contractant des maladies comme Zika. En attendant, Anna-Bella Failloux rappelle les conseils habituels contre ces insectes : « Des vêtements couvrants et pas d’activité en extérieur lors des pics de présence des moustiques. »
Retrouvez l’interview d’Arnaud Fontanet dans l’émission RTL midi du 23 Octobre 2019
Retrouvez l’interview d’Anna-Bella Failloux dans l’émission de France Inter du 23 Octobre 2019
Retrouvez l’interview d’Anna-Bella Failloux dans l’Express
Retrouvez l’interview d’Anna-Bella Failloux sur FranceInfo TV
Anna-Bella Failloux et Arnaud Fontanet font le point sur les cas autochtones de Zika dans un article de The Conversation
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Maladies infectieuses émergentes du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.