Benoit est passionné par les expériences depuis l’enfance. « First generation college student », comme on le dit aux Etats-Unis, ou première génération de sa famille à poursuivre des études supérieures à l’université, il a franchi pas à pas les étapes pour devenir chercheur. Pédagogue et passionné, il souhaite que la science puisse être ouverte à tous.
Son sujet actuel : étudier et mesurer l’impact de notre alimentation, et notamment de certains additifs, sur notre flore intestinale. Son équipe analyse les effets des agents émulsifiants sur la biodiversité microbienne, en lien avec certaines maladies chroniques telles que la maladie de Crohn, le diabète et l’obésité. Benoit pense que ses recherches pourront participer, dans le futur, à une médecine personnalisée visant à rétablir la richesse de notre microbiote face à l’alimentation moderne.
Vacances à la ferme, Université et les États-Unis
Si Louis Pasteur était fils de tanneur dans le Jura, Benoît, lui, est petit fils d’artisans et d’agriculteurs du centre de la France. Ses vacances se déroulent à la ferme : il apprend à traire les vaches, à donner le biberon aux veaux et à produire du bon fromage ! Il découvre la science au lycée, puis cet intérêt grandit lors de ses années universitaires.

En fait, j’ai toujours été passionné par les sciences au sens large – et je me souviens encore du livre “Mega Expériences” que m’avaient offert mes parents. Je devais avoir 9 ou 10 ans, il a été à l’origine de mes premières expériences scientifiques !
Au sein du laboratoire du Pr. Arlette Darfeuille-Michaud, il réalise une thèse consacrée à une bactérie intestinale : les Escherichia coli. Pour son post-doctorat, il part aux États-Unis. Dans le laboratoire du Professeur Andrew Gewirtz, il découvre le microbiote intestinal, cet écosystème fascinant et aux multiples incidences sur santé humaine. À la suite de ce post-doctorat, il ouvre en 2017 sa propre unité au sein de la Georgia State University à Atlanta.
Retour à Paris pour une recherche sur des pathologies chroniques intestinales
Grâce à l’obtention d’un financement européen (ERC Starting Grant), Benoit relocalise sa recherche et son laboratoire en France, pour une recherche plus translationnelle. En réalisant des essais cliniques en lien avec des échantillons de patients, son équipe démontre notamment le rôle majeur joué par les bactéries intestinales associées à la couche de mucus, gel tapissant nos intestins, dans la survenue de diverses maladies inflammatoires chroniques.
Un déménagement, des cartons, une équipe et des milliards de bactéries
Aujourd’hui installé dans son nouveau laboratoire avec toute son équipe, Benoît est ravi de poursuivre ses travaux au sein de l’Institut Pasteur de Paris, parmi ses pairs et en lien avec de nombreux spécialistes, afin d’étayer ses recherches sur les aspects mécanistiques et immunologiques des interactions microbiote – intestin.
En lien avec les nouvelles priorités scientifiques de l’Institut, Benoît et son équipe continuent d’étudier l’impact des émulsifiants alimentaires sur notre microbiote intestinal. En bonne santé, celui-ci compte 100 000 milliards de bactéries et environ 200 à 300 espèces différentes. Ces bactéries communiquent entre elles et sont à l’origine de la mise en place de notre système immunitaire et notre bonne santé physique et mentale. Mais l’industrialisation de l’alimentation a bousculé cet équilibre

Nos derniers travaux montre clairement que les émulsifiants modifient à long terme la qualité de notre microbiote intestinal. Ces émulsifiants diminuent notre diversité microbienne et favorisent les mauvaises bactéries. Lors d’un ambitieux essai clinique collaboratif, nous venons de montrer qu’éliminer la consommation de ces additifs permettait, chez des patients atteints de maladie de Crohn, d’augmenter les chances de rémission !
Les additifs dans notre assiette, en bref Aujourd’hui, plus de 300 additifs alimentaires sont autorisés par les agences de régulation. Antioxydants, épaississants, émulsifiants, conservateurs ou édulcorants : nous les retrouvons dans la composition de nos produits alimentaires industriels, sous les noms de EXXX : E140, E471… Ils sont présents dans les yaourts, le lait d’amande, la crème fraîche allégée, les glaces, le pain de mie, etc. |
Biodiversité mondiale et santé humaine
Selon Benoit, la perte de la biodiversité bactérienne intestinale peut être comparée avec la perte de biodiversité à l’échelle de notre planète (espèces animales). En Amérique du Nord et en Europe, où nos modes de vie favorisent une nourriture industrialisée, mais aussi, depuis une vingtaine d’années, en Inde ou en Asie, les scientifiques constatent que notre microbiote intestinal s’appauvrit. Des scientifiques sont d’ailleurs en train de constituer des biobanques de microbiotes à travers le monde, afin de conserver une mémoire de cette diversité. Un effort auquel le laboratoire de Benoit va contribuer dès cette année !
Obésité, diabètes, maladie de Crohn : des thérapies innovantes
Pour Benoît, l’avenir des traitements de ces pathologies chroniques et complexes reposera sur une approche de médecine personnalisée avec, pour certain patients, une réelle opportunité thérapeutique en agissant sur le microbiote. Il faudra par exemple faire un état des lieux du microbiote d’un patient donné afin de mettre en place une nutrition personnalisée, de l’adapter, voire de rétablir un bon microbiote via une transplantation fécale ! Cette dernière est déjà utilisée pour éradiquer une bactérie pathogène : Clostridioides difficile, qui peut s’avérer mortelle. L’équipe de Benoit travaille également, grâce au soutien récent d’un nouveau financement ERC Consolidator,sur certaines souches probiotiques et fibres alimentaires favorisant la santé métabolique et intestinale. Résultats à découvrir très prochainement sur ce site !
Benoit Chassaing en quelques dates
Formation et qualifications
2019 : Habilitation à Diriger des Recherches, Université Paris Descartes, Paris, France
2011 : Doctorat, Physiologie génétique et moléculaire, Université d'Auvergne, Clermont-Ferrand, France.
2008 : Master of Science, Génétique et physiologie, Université d'Auvergne, Clermont-Ferrand, France
Postes actuels
Depuis 2024 : Directeur de recherche et chef de groupe, Interactions Microbiote-Hôte, Institut Pasteur, Paris, France)
Depuis 2021 : Professeur associé et contrat d'interface, Instituts Hospitalo-Universitaires (IHU INFINY) sur les maladies inflammatoires de l'intestin (CHRU Nancy, Université de Lorraine, Nancy, France)
Postes précédents
2019-2024 : Directeur de recherche et chef de groupe, « Microbiote et maladies inflammatoires chroniques » (Institut Cochin, Paris, France)
2019-2021 : Chargé de recherche à l'INSERM, poste permanent (CRCN, Paris, France)
2015-2019 : Professeur assistant, Institut des sciences biomédicales / Institut des neurosciences, Georgia State University, Atlanta, États-Unis
2012-2015 : Chercheur post-doctoral, « Processed foods, microbiota, and IBD » (aliments transformés, microbiote et maladies inflammatoires de l'intestin). Institut des sciences biomédicales, Georgia State University , Atlanta, États-Unis