Après avoir confirmé les premiers cas d’infections au Surinam puis en Guyane, l’Institut Pasteur de la Guyane vient de séquencer le génome intégral du virus Zika responsable d’une épidémie sans précédent touchant actuellement dans la zone tropicale du continent américain. Publiée dans la revue The Lancet l’analyse de cette séquence montre une homologie quasi complète avec les souches à l’origine de l’épidémie qui a sévi en 2013 et 2014 dans le Pacifique.
En novembre dernier, sollicitée par ses collègues du Surinam, l’équipe du laboratoire de virologie de l’Institut Pasteur de la Guyane, Centre national de référence des arbovirus pour la région Antilles-Guyane, a confirmé les cinq premiers cas autochtones d’infection par le virus Zika au Surinam. C’est à partir de l’un des cinq échantillons que les chercheurs de l’Institut Pasteur de la Guyane viennent d’établir la séquence génétique complète de cette souche virale. Publiée aujourd’hui dans la revue The Lancet, l’analyse de ce génome montre qu’il s’agit d’un lignage asiatique qui présente plus de 99% d’homologie avec la souche responsable de l’épidémie en Polynésie française en 2013. « Jusqu’ici peu de séquences intégrales de ce virus et aucune de la souche circulant actuellement en Amérique du Sud et en Amérique Centrale n’étaient disponibles. L’obtention de la séquence complète du virus est un point de départ important pour mieux comprendre l’évolution de son comportement », indique Dominique Rousset, responsable du laboratoire de virologie et du Centre national de référence des Arbovirus à l’Institut Pasteur de la Guyane.
C’est en mai 2015 que les premiers cas de Zika ont été confirmés au Brésil. Le pays subit aujourd’hui la plus importante épidémie jamais décrite, avec 440 000 à 1 300 000 cas suspects rapportés par les autorités de santé brésiliennes. Depuis le virus Zika s’est rapidement propagé, affectant à ce jour 10 pays de la zone tropicale du continent américain ainsi que les Caraïbes. Alors que l’infection était considérée jusqu’à récemment comme bénigne, l’épidémie de virus Zika qui a sévi en 2013-2014 en Polynésie française et dans le Pacifique s’est accompagnée d’une augmentation de complications neurologiques sévères, telles que le syndrome de Guillain-Barré et de malformations neurologiques congénitales. Au Brésil, l’augmentation très significative du nombre de microcéphalies chez des fœtus dont les mères ont été infectées en cours de grossesse a contraint le gouvernement à déclarer l’état d’urgence sanitaire en décembre 2015. « Ces anomalies sont-elles dues uniquement au virus Zika, ou à la circulation conjointe d’autres agents infectieux ou à d’autres facteurs ? Des projets de recherche multidisciplinaires doivent être mis en place pour tenter de répondre à ces interrogations. D’ores et déjà, nous nous appliquons à mieux connaitre ce virus et comprendre son évolution, ce qui passe notamment par le renforcement des outils de diagnostic », explique Dominique Rousset.
Par ailleurs, une équipe de quatre chercheurs de l’Institut Pasteur de Dakar est arrivée mardi à Sao Paulo pour aider les scientifiques brésiliens à faire face à l’épidémie de Zika.
Actuellement 17 cas ont été confirmés en Guyane et 3 en Martinique. Compte tenu de l’expansion très rapide du virus Zika, l’Institut Pasteur de la Guyane reste fortement mobilisé dans la surveillance épidémiologique, en partenariat avec les autorités de santé et le réseau international des Instituts Pasteur. « Nous sommes investis dans l'appui à la lutte antivectorielle au travers du suivi de la résistance aux insecticides, dans le cadre d’une convention avec l’ARS. Des travaux de recherche sur l'impact de cette résistance sur la compétence vectorielle des populations d'Aedes aegypti à différents arbovirus, dont le virus Zika, sont en outre menés au Vectopole », explique Isabelle Dusfour, entomologiste à l’Institut Pasteur de la Guyane.
Décrit pour la première fois en Ouganda en 1947, Zika est un arbovirus de la même famille que le virus de la dengue et se transmet par le même vecteur, le moustique Aedes aegypti.
Il peut en outre se transmettre par le moustique tigre, Aedes albopictus, qui est présent dans certains départements de France métropolitaine. Sous la direction de l’entomologiste Anna-Bella Failloux, responsable de l’unité Arbovirus et insectes vecteurs, l’Institut Pasteur mène actuellement à Paris des projets de recherche pour évaluer la compétence vectorielle d’Aedes aegypti et d’Aedes albopictus, et déterminer la contribution des deux espèces dans la dynamique de l'épidémie de Zika. Ces travaux aideront à mieux estimer le risque d’introduction du virus en France.
Pour en savoir plus, consulter la fiche d'information Zika
Source
Zika virus genome from the Americas, The Lancet, 7 janvier 2016
Antoine Enfissi (1), John Codrington (2), Jimmy Roosblad (2), Mirdad Kazanji (1), Dominique Rousset (1)
(1) Institut Pasteur de la Guyane, Laboratoire de Virologie, Cayenne, French Guiana, France
(2) Laboratory Academisch Ziekenhuis, Paramaribo, Suriname
Contacts presse
- A Cayenne
Sophie Groene-Lacoste - sgroenelacoste@pasteur-cayenne.fr - +594 (0)5 94 29 58 03
Mirdad Kazanji (directeur de l’IP-Guyane) – mkazanji@pasteur-cayenne.fr - +594 (0)5 94 29 26 01
- A Paris
Marion Doucet – presse@pasteur.fr – +33 (0)1 45 68 89 28
Myriam Rebeyrotte – presse@pasteur.fr – +33 (0) 1 45 68 81 01
A propos de l’Institut Pasteur de la Guyane
Implanté en Guyane depuis 1940, l’Institut Pasteur de la Guyane fait partie du Réseau international des Instituts Pasteur et Instituts associés. Ses missions s’articulent autour de quatre composantes : la recherche, l’enseignement, l’appui à la santé publique et les services à la population.
L’Institut Pasteur de la Guyane est l’une des 33 institutions membres du Réseau International des Instituts Pasteur. Implanté dans 26 pays sur 5 continents, ce réseau a pour mission de contribuer à la surveillance et à la lutte contre les maladies infectieuses par la recherche, la santé publique et la formation.