Dans une étude parue le 15 mars, des chercheurs démontrent comment les parasites à l’origine de la leishmaniose s’adaptent à l’insecte qu’ils infectent.
La leishmaniose est une maladie parasitaire qui touche de nombreuses espèces de mammifères, parmi lesquelles l’être l’humain. Les Leishmania, parasites en cause, réalisent leur cycle de vie en infectant tour à tour des mammifères et certains insectes dits « vecteurs » : les phlébotomes. Or, les Leishmania peuvent présenter une grande diversité génétique, qui peut modifier les symptômes qu’ils provoquent et les rendre plus ou moins sensibles aux médicaments.
Pour caractériser l’impact de l’environnement rencontré dans le tube digestif des phlébotomes sur cette variabilité génétique, des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Université Charles de Prague ont infecté, via des protocoles sécurisés, des phlébotomes avec des Leishmania donovani, une des espèces responsables de la maladie. Ils ont également cartographié le génome de ces parasites, avant et après l’infection, afin de réaliser une comparaison.
Un environnement hostile propice à la sélection
Les chercheurs ont alors constaté que l’infection du phlébotome par les Leishmania a modifié les génomes de ces derniers… mais pas n’importe comment. « Nos analyses ont permis de découvrir des mutations typiques de dommages oxydatifs infligés à l’ADN. Cela suggère que Leishmania souffre de stress oxydatif à l’intérieur du tube digestif du phlébotome » affirme Gérald Spaeth, directeur de l’unité Parasitologie moléculaire et Signalisation à l’Institut Pasteur et co-auteur de l’étude. Dans cet environnement défavorable, le parasite subit la pression de la sélection naturelle, et les individus développant spécifiquement ces mutations présentent un avantage évolutif facilitant leur survie.
« Notre expérience fournit un modèle utile pour évaluer l’adaptation évolutive d’autres pathogènes à leurs insectes vecteurs ; notamment les Plasmodium, agents responsables du paludisme » déclare Isabelle Louradour, chercheuse au sein de l’unité et co-autrice de l’étude. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les leishmanioses affectent chaque année 70 0000 à 1 million de personnes dans le monde.
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire Résistance aux agents antimicrobiens du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.
Source
Leishmania allelic selection during experimental sand fly infection correlates with mutational signatures of oxidative DNA damage
Giovanni Bussotti1,2, Blaise Li1, Pascale Pescher2, Barbora Vojtkova3, Isabelle Louradour2, Katerina Pruzinova3, Jovana Sadlova3, Petr Volf3, and Gerald F. Späth2
1Institut Pasteur, Université Paris Cité, Bioinformatics and Biostatistics Hub, F-75015 Paris, France
2Institut Pasteur, Université Paris Cité, INSERM U1201, Unité de Parasitologie moléculaire et Signalisation, F-75015 Paris, France
3Department of Parasitology, Faculty of Science, Charles University, Prague 2, 128 44, Czech Republic.