Les anticorps monoclonaux semblent prometteurs dans la prévention du paludisme, nous devons encore comprendre précisément leur mode d’action. Des scientifiques de l’Institut Pasteur ont développé un modèle afin de les étudier et d’en identifier de plus efficaces.
Le paludisme est la maladie vectorielle la plus mortelle dans le monde, provoquant plus de 600 000 décès par an. Une maladie vectorielle est due à un agent infectieux (ici surtout le parasite Plasmodium falciparum) transmis principalement par un arthropode hématophage (ici les moustiques).
Des travaux précédents avaient montré que des anticorps monoclonaux ciblant une protéine de Plasmodium falciparum pouvaient bloquer l’infection. Mieux comprendre leur fonctionnement sera utile pour développer des anticorps plus efficaces et prévenir cette maladie.
Développer de nouvelles armes contre le paludisme
S’il existe un vaccin, qui cible aussi la même protéine que les anticorps monoclonaux protecteurs, son efficacité est modérée, et de nouveaux traitements sont nécessaires pour endiguer le paludisme. « Un essai de phase 1 a déjà permis d’évaluer la sécurité et l’efficacité de deux anticorps monoclonaux, explique Manuela Aguirre-Botero, doctorante de l’unité Infection et immunité paludéenne (Institut Pasteur) et première autrice de l’étude. Ces anticorps peuvent prévenir le paludisme, mais en raison des quantités relativement importantes d’anticorps nécessaires pour obtenir une protection, il est nécessaire d’identifier des anticorps monoclonaux plus puissants. »
Une étude menée par l’Institut Pasteur, en collaboration avec des centres de recherche américains, apporte des critères qui permettront de sélectionner des anticorps plus efficaces et ainsi améliorer cette piste prophylactique.
Tester les anticorps grâce à un modèle imitant la peau humaine
Dans cette étude, les chercheurs ont découvert que l’efficacité protectrice des anticorps était principalement atteinte lorsque le parasite se déplace dans la peau. Pour mieux comprendre ce processus, les scientifiques ont développé un modèle qui imite l’environnement du parasite au début de l’infection. « Dans ce test in vitro, nous avons placé les parasites dans une matrice poreuse en gel qui ressemble à l’environnement 3D de la peau et nous les avons incubés avec des anticorps monoclonaux », décrit Manuela Aguirre-Botero. « Cet essai de matrice 3D a considérablement amélioré la toxicité des anticorps contre le parasite et imité le rôle protecteur de la peau. »
Une piste prometteuse pour identifier des anticorps prophylactiques puissants
« Ce nouveau test in vitro permet donc de mesurer l'effet neutralisant des anticorps, qui est en étroite corrélation avec leur activité protectrice in vivo », poursuit la scientifique. « Désormais, nous pouvons tester un large panel de nouveaux anticorps monoclonaux in vitro et sélectionner les plus puissants pour les tester in vivo".
Les anticorps monoclonaux, déjà utilisés pour traiter des maladies auto-immunes ou certains cancers, pourraient donc représenter des outils clés dans la lutte contre le paludisme.
Cette étude entre dans le cadre de l’axe scientifique prioritaire maladies infectieuses émergentes du plan stratégique 2019-2023 de l’Institut Pasteur.
Source :
Cytotoxicity of human antibodies targeting the circumsporozoite protein is amplified by 3D substrate and correlates with protection, Cell Reports, 25 July 2023
DOI: https://doi.org/10.1016/j.celrep.2023.112681