Une équipe interdisciplinaire de chercheurs de l’Institut Pasteur et du Georgia Institute of Technology a reçu la somme de 2,5 millions de dollars des National Institutes of Health (NIH) pour étudier la phagothérapie. Ce projet vise à approfondir les connaissances fondamentales et le potentiel clinique des virus tueurs de bactéries, également appelés bactériophages, dans le traitement des infections résistantes aux antibiotiques.
Grâce à ce financement sur cinq ans, Joshua Weitz, de la School of Biological Sciences du Georgia Tech, et Laurent Debarbieux, de l’Institut Pasteur, à Paris, dirigeront conjointement des équipes, aux États-Unis et en France, qui étudieront les interactions entre les bactériophages et la réponse immunitaire de l’hôte dans le traitement des infections respiratoires aiguës causées par des bactéries multirésistantes.
La phagothérapie, une piste contre la résistance aux antibiotiques
La propagation des pathogènes résistants aux antibiotiques est un véritable enjeu de santé publique. C’est la raison pour laquelle l’Institut Pasteur consacre un de ses axes prioritaires de recherche à la résistance aux agents antimicrobiens, dans son plan stratégique 2019-2023.
Pour répondre à cet enjeu, les chercheurs et praticiens explorent d’autres approches que l’antibiothérapie pour soigner les infections bactériennes causées par des germes résistants aux antibiotiques, dont la phagothérapie qui repose sur l’utilisation de bactériophages, des virus qui infectent et tuent uniquement les bactéries. Dans une étude de 2017, publiée dans la revue Cell Host and Microbe, les équipes de Joshua Weitz et Laurent Debarbieux ont montré qu’une synergie entre le système immunitaire et le bactériophage est essentielle pour traiter une infection.
La phagothérapie, des mécanismes thérapeutiques à approfondir
Progresser dans la compréhension fondamentale de la phagothérapie permettra de renforcer son efficacité et sa fiabilité en utilisation clinique. Les équipes américaine et française consacreront ce financement des NIH (1R01AI46592-01 ; Synergistic Control of Acute Respiratory Pathogens by Bacteriophage and the Innate Immune Response, ou contrôle synergique des pathogènes respiratoires aigus par les bactériophages et la réponse immunitaire innée) à l’examen de la dynamique de la synergie entre les phages et la réponse immunitaire dans le traitement des infections respiratoires aiguës.
« Ce projet offre une formidable opportunité d’intégrer la modélisation mathématique à la recherche fondamentale sur la phagothérapie », explique Joshua Weitz. « Nous sommes ravis de prolonger notre collaboration avec l’équipe de phagothérapie expérimentale dirigée par Laurent Debarbieux afin d’approfondir par itérations notre compréhension mécanistique du fonctionnement de la phagothérapie in vivo et de développer des stratégies pour déployer la phagothérapie dans un cadre translationnel. »
« Permettre de mieux comprendre et donc de mieux contrôler la phagothérapie est une étape essentielle pour mieux l’utiliser en clinique », déclare Laurent Debarbieux. « Notre collaboration avec l’équipe de biologie quantitative et d’écologie théorique dirigée par Joshua Weitz nous permettra d’appréhender l’ensemble des paramètres impliqués dans l’efficacité de la phagothérapie ».
Pour atteindre leurs objectifs, les chercheurs associeront modélisation mathématique (à Georgia Tech) et expérimentation animale (à l’Institut Pasteur). S’appuyant sur leurs résultats de 2017, ils étudieront les interactions tripartites entre les bactériophages thérapeutiques, les cellules immunitaires innées (neutrophiles), et la bactérie multirésistante Pseudomonas aeruginosa, avec un système in vitro et un modèle murin de pneumonie aiguë. Le projet s’intéressera à la compréhension et l’optimisation de la synergie entre les bactériophages et les neutrophiles pour éliminer les bactéries, même lorsque la réponse immunitaire de l’hôte est altérée.
Ce projet entend, globalement, offrir un cadre à l’approfondissement des principes d’écologie des bactériophages et d’immunologie innée dans la conception rationnelle de la phagothérapie.
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