Les mécanismes permettant au cerveau d’adapter son fonctionnement en fonction du temps sont encore mal compris. Des chercheurs de l’Institut Pasteur ont utilisé un réseau de neurones artificiel pour modéliser l’activité du cervelet, la région du cerveau responsable de la coordination motrice et du minutage des actions cognitives.
Le cerveau est sans nul doute l’un des organes les plus mystérieux de notre corps (lire le dossier Décrypter les mystères du cerveau). Il n’est pas seulement capable de recevoir des informations, il peut aussi les dater chronologiquement jusqu’à l’échelle de l’heure : c’est notamment grâce à cela que le rythme circadien, qui nous permet d’alterner entre veille et sommeil suivant l’heure de la journée, se met en place. Toutefois, il est parfois nécessaire de traiter des informations sur une durée inférieure à la seconde, par exemple pour prendre des décisions rapides ou réaliser des mouvements complexes. C’est le rôle du cervelet, une zone du cerveau située derrière le sommet de notre nuque. Certains neurones du cervelet sont activés durant de telles situations, mais on ne savait pas jusque là s’ils agissaient de manière isolée ou de concert pour mesurer le temps.
Des chercheurs de l’unité Dynamique des synapses et des circuits neuronaux de l’Institut Pasteur de Paris, ont utilisé un réseau de neurones artificiel similaire à ceux employés dans le deep-learning. « Ce modèle reproduit l’activité neuronale émises par des animaux dans des comportements spécifiques, tels que le réflexe de fermer un œil juste avant un stimulus désagréable », décrit David DiGregorio, chef de l’unité et co-auteur de l’étude.
En passant successivement par différents neurones, les messages sont croisés et compilés jusqu’à former un unique message. C’est ainsi que, face à un stimulus, une réponse de durée variable est émise, et éventuellement intégrée par apprentissage pour générer des mouvements précis. Crédit : Barri and DiGregorio (Dynamique des synapses et des circuits neuronaux)
« Grâce à des synapses nombreuses et dynamiques, le réseau peut générer des impulsions électriques de schémas temporels diversifiés. Tous ces signaux, regroupés ensemble, forment alors une base pour générer de nouvelles impulsions précisément chronométrées qui constituent le message final », précise Alessandro Barri, co-auteur de l’étude. Reproduire ce schéma peut à terme développer une réponse encore plus rapide et spécifique au stimulus, exactement comme dans le cadre d’un apprentissage.
Source
Synaptic basis of a sub-second representation of time in a neural circuit model. Nature Communications, 22 décembre 2022. https://doi.org/10.1038/s41467-022-35395-y
Barri, A.1, Wiechert, M.T.1, Jazayeri, M.2 et D. A. DiGregorio1.
1. Institut Pasteur, Université Paris Cité, Synapse and Circuit Dynamics Laboratory, CNRS UMR 3571, Paris, France
2. McGovern Institute for Brain Research, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, MA, USA
Department of Brain and Cognitive Sciences, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, MA, USA